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Publié le 09 - 11 - 2016

    La défense des classes moyennes est au centre de nos propositions

    Alstom et l’avenir des filières industrielles françaises, le prélèvement à la source, la fiscalité et le revenu universel.

    Gérard Mardiné, secrétaire national CFE-CGC, passe en revue quelques-uns des grands dossiers d’actualité du secteur Économie, Industrie, Développement durable, RSE et Logement.


    Quels enseignements peut-on tirer du dossier Alstom et pour l’avenir de nombreux sites industriels français ?
    Devenue très politique, la gestion du dossier Alstom est avant tout révélatrice du cruel manque d’anticipation quant à une stratégie de filière pérenne. Ces premières mesures pour le site de Belfort doivent désormais permettre de donner du temps afin de développer un projet de long terme.
    Plus globalement, il faut s’interroger sur la compétitivité des sites industriels français qui pâtissent de retards d’investissement car la priorité a trop souvent été donnée, en particulier dans les grandes entreprises, à la rémunération des actionnaires. La pression sur les prix exercée par les grands groupes auprès de leurs sous-traitants affaiblit en outre notre tissu de PME, qui peine souvent à investir faute de marges suffisantes.
    L’autre enseignement, c’est l’absolue nécessité de sécuriser les investissements et de protéger la propriété intellectuelle, les savoir-faire, les brevets et les compétences. La CFE-CGC propose notamment, dans le cadre d'un rachat d'entreprise, de reconnaître une valeur temporelle au capital de savoir-faire collectif de l'entreprise et d'attacher à l'ensemble des salariés d'une entreprise (ou de leur entité économique autonome) un droit à protection de ce savoir-faire dans le respect de l'intérêt social.

    La CFE-CGC a toujours affiché son hostilité au prélèvement à la source"

    Visant à moderniser le recouvrement de l'impôt, le prélèvement à la source doit entrer en vigueur au 1er janvier 2018. Pourquoi la CFE-CGC s’est-elle positionnée contre ce dispositif ? Quels sont les risques ?
    Ce dispositif, d’une rare incohérence, n’a pas de sens : pourquoi aller mettre les entreprises dans la boucle du prélèvement de l’impôt alors qu’existe déjà le dispositif de mensualisation qui permet de faire la même chose ? Je suis très sceptique quant au nombre de salariés pour qui la situation va se révéler intéressante…
    La CFE-CGC a toujours affiché son hostilité au prélèvement à la source car l’employeur aura dès lors connaissance de la situation fiscale du salarié, autant d’informations qui défavorisent ce dernier, en particulier en cas de négociations salariales. Pour la CFE-CGC, le prélèvement à la source marque à terme la fin du foyer fiscal auquel elle est très attachée.
    Enfin, il ne faudrait pas que ce dispositif préfigure d’une fusion entre la contribution sociale généralisée (CSG) et l’impôt sur le revenu, laquelle serait préjudiciable pour les classes moyennes.

    En matière de fiscalité, la CFE-CGC, très critique sur le bilan du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), continue de plaider pour la mise en place d’une cotisation sociale sur la consommation…
    Au regard des sommes considérables engagées (43 milliards d’euros depuis la création du dispositif en 2013) et du piètre bilan récemment confirmé par le rapport 2016 du comité de suivi du CICE, la CFE-CGC réitère sa demande d’un meilleur ciblage des mesures de soutien à l’économie et exige que des contreparties garantissent un retour sur investissement à la collectivité nationale.
    La CFE-CGC milite en effet depuis des années pour l’instauration dela cotisation sociale sur la consommation (CSC), une mesure structurelle dont le dispositif permettrait d’améliorer la compétitivité de nos entreprises en baissant le coût du travail et en impactant les produits importés. Concrètement, il s’agit de financer la Sécurité sociale en remplaçant les cotisations patronales maladie par une nouvelle cotisation assise sur la consommation.

    Le revenu universel ? Il faut d’abord en mesurer tous les impacts économiques et sociétaux"

    La CFE-CGC a répondu il y a quelques semaines à une consultation de France Stratégie dans le cadre du projet « 2017-2027 » sur la thématique « Croissance et répartition des revenus ». Quels en sont les grands principes et préconisations ?
    La défense des classes moyennes, la cohésion du corps social et les impératifs de développement durable sont au cœur de nos propositions. Une amélioration du pouvoir d’achat des classes moyennes, outre qu’il est un gage de stabilité sociale, viendrait soutenir la consommation et redonnerait confiance aux forces contributives de notre pays qui subissent depuis 2011 une forte pression fiscale.
    La CFE-CGC se bat pour une juste rémunération des efforts et des responsabilités, et en faveur d’un partage équitable de la valeur ajoutée. Sur le terrain fiscal, nous rappelons notamment qu’il serait contre-productif d’augmenter la progressivité de l’impôt sur le revenu.
    Enfin, tous les sujets liés au développement durable - utilisation raisonnée des ressources naturelles, préservation de la biodiversité, lutte contre le réchauffement climatique, investissements d’avenir, efficacité énergétique, logement… - sont également au centre des enjeux.

    Lutte contre la pauvreté, place du travail dans la société… Le revenu universel (ou revenu de base) s’est invité dans le débat public. Quelle est l’approche de la CFE-CGC, récemment auditionnée au Sénat sur le sujet ?
    Le revenu universel fait partie d’une famille de solutions, parmi d’autres. La CFE-CGC souhaite que les analyses soient menées en profondeur afin de mesurer tous les impacts économiques et sociétaux qu’occasionnerait la mise en place d’un tel dispositif. Quel serait le montant de ce revenu ? Supprimerait-on le Smic ? Quid du financement ? Se substituerait-il à d’autres prestations/aides existantes et si oui, lesquelles ? Pour la CFE-CGC, la retraite, l’assurance chômage et la maladie doivent être exclus d’un tel dispositif.
    En résumé, notre organisation n’est pas fermée sur le sujet - y compris quant à une éventuelle expérimentation bien encadrée du dispositif - mais il ne faut surtout pas se précipiter !

    Propos recueillis par Mathieu Bahuet