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Publié le 14 - 01 - 2021

    « Voir la CFE-CGC continuer sa progression dans les entreprises »

    Accords sur le télétravail et la santé au travail, protocole sanitaire en entreprise, plans sociaux, fichage syndical… François Hommeril, président confédéral, passe en revue les dossiers de l’actualité sociale.

    À l’aube de cette nouvelle année, que peut-on souhaiter à la CFE-CGC et à toutes ses composantes ?

    Je veux ici souhaiter une bonne et heureuse année à tous nos adhérents et à nos militants, à la hauteur de leur professionnalisme et de leur investissement dans l’activité syndicale. Plus largement, je souhaite à la CFE-CGC de poursuivre son développement et sa progression des dernières années dans les entreprises. La CFE-CGC est une organisation syndicale de plus en plus respectée. Nous pesons dans le débat et sur les décisions qui sont prises, à tous les niveaux. Les prochaines élections TPE (du 22 mars au 4 avril 2021) viendront d’ailleurs conclure le cycle électoral entamé en 2017 et qui donnera la nouvelle mesure d’audience de la représentativité syndicale.

    À l’issue d’intenses négociations, les partenaires sociaux viennent de conclure des accords nationaux interprofessionnels (ANI) sur le télétravail puis sur la santé au travail, tous deux signés par la CFE-CGC après consultation de ses instances. Quelle lecture en faites-vous ?

    Au-delà des attendus et des positions de chacun, il y a désormais sur la table deux accords négociés et signés par les organisations syndicales et d’employeurs qui vont s’appliquer sur deux sujets fondamentaux particulièrement d’actualité. En un temps plutôt resserré et dans un contexte difficile, les partenaires sociaux ont su prendre toutes leurs responsabilités. Vis-à-vis d’un gouvernement qui a trop souvent tendance à nous tirer le tapis sous le pied, ces accords sont un message fort.

    Ce nouvel accord sur le télétravail a le mérite d’encadrer la pratique de la continuité d’activité à domicile »

    Dans le contenu, comment jugez-vous l’accord signé sur le télétravail, dont le dernier ANI datait de 2005 ?

    Pour la CFE-CGC, il était impératif de traiter urgemment les problématiques liées à la continuité d’activité à domicile (CAD) expérimentée et vécue par des millions de salariés depuis mars dernier en raison des contraintes sanitaires, et qui n’est pas du télétravail. Le télétravail classique est un dispositif qui nécessite l’accord du salarié et qui doit être encadré par des accords permettant de travailler dans des conditions équivalentes à celles du présentiel. Ce nouvel accord national interprofessionnel a le mérite d’encadrer la pratique de la CAD quand celle-ci est nécessaire, en listant les sujets qui doivent être pris en compte dans un accord de branche ou un accord d’entreprise. J’ai un regret concernant les modalités relatives à la communication syndicale vis-vis des salariés - par exemple l’utilisation des mails - qui n’est pas encore suffisamment bien prise en compte.

    Qu’en est-il de l’accord sur la santé au travail, qui doit désormais être transposé par une proposition de loi ?

    Il y a dans cet accord un certain nombre d’éléments positifs. Il ancre la priorité de la prévention primaire en santé au travail, ce qui constitue une avancée notoire, et réaffirme les principes fondamentaux en matière de responsabilité de l’employeur. Par ailleurs, le périmètre de la prévention des risques s’ouvre à l’organisation du travail tandis que les risques psychosociaux (RPS) inhérents à l’activité professionnelle trouvent enfin leur place. Il était temps ! La CFE-CGC exerce un leadership depuis vingt ans en la matière. Avec cet accord, plus personne ne peut désormais prétendre que la question des RPS n’est pas un sujet de santé au travail pour les employeurs. C’est un progrès et ce sera un argument supplémentaire pour nos délégués syndicaux en entreprise.

    Le gouvernement a dévoilé son nouveau protocole sanitaire en entreprise applicable depuis le 7 janvier, avec notamment la possibilité, pour les salariés en télétravail, de venir un jour par semaine en présentiel s’ils en expriment le besoin. Qu’en dit la CFE-CGC ?

    Le gouvernement a tendance à nous prendre pour des enfants et à faire croire qu’il possède toutes les clés de tous les bureaux du pays. Les enquêtes, parmi lesquelles celles conduites par nos structures, le montrent : le télétravail est une organisation qui n'est pas sans conséquence sur les individus. Les protocoles sanitaires sont déjà adaptés par les entreprises qui les mettent en œuvre. Il faut faire confiance et responsabiliser les acteurs de terrain pour créer les conditions favorables dans chaque entreprise.

    Dans le cadre de la campagne de vaccination contre la Covid-19, l’exécutif veut mettre à contribution les entreprises. La CFE-CGC y est-elle favorable ?

    Je me garderais bien de formuler un avis sur la campagne de vaccination, il y a trop d’experts sur le sujet. Aujourd’hui, dans les entreprises dotées d’un service médical, on pratique déjà, tous les ans, la vaccination contre la grippe. C’est plutôt efficace. Il me semblerait donc logique, sous réserve de leur capacité à respecter toute la logistique induite, que les entreprises puissent faire de même avec le vaccin anti-Covid.

    Les partenaires sociaux et le gouvernement ont finalisé le nouveau dispositif dit de « transition collective », qui doit accompagner les transitions professionnelles de salariés dont l’emploi est menacé. Que peut-on en attendre ?

    Nous sommes favorables à tous les dispositifs visant, de manière opérationnelle, à maintenir et à faire évoluer les compétences des salariés. La CFE-CGC soutient donc ce nouveau dispositif de transition et de réinsertion professionnelle. Je continue toutefois de penser qu’en matière de formation, c’est lorsque le salarié est dans l’entreprise que les investissements qualitatifs sont les plus efficients. Il faut tout faire pour maintenir les salariés dans l’entreprise. 

    Le fichage syndical est très choquant »

    Le Conseil d’État a récemment refusé de suspendre les décrets permettant un fichage de l’appartenance syndicale, autorisant de facto, au nom de la sûreté de l’État, le fichage des syndicalistes. Comment réagit la CFE-CGC ?

    Les organisations syndicales sont sommées de mener un gros travail (gestion et mise à jour des fichiers, etc.) pour se mettre en conformité avec le Règlement général sur la protection des données (RGPD) et ainsi veiller au respect de la confidentialité des données concernant les adhérents. Dès lors, de quel droit l’État peut-il nous imposer ces contraintes et s’absoudre lui-même de cette obligation ? Ce fichage syndical est très choquant. Nous resterons mobilisés sur le sujet.

    Où en est-on de la réforme gouvernementale de l’assurance chômage, reportée au 1er avril et dont le Conseil d’État a suspendu deux dispositions très contestées (les modalités de calcul de l'allocation et l’instauration d’un bonus-malus) ?

    La CFE-CGC n’a cessé de le faire valoir ces derniers mois : cette réforme punitive, dont le seul objectif est de serrer la vis aux demandeurs d’emploi, est une trahison de la part du gouvernement. La dégressivité des indemnités des cadres est particulièrement scandaleuse dans une période où les offres d’emplois baissent et où les PSE se multiplient, touchant massivement les cadres et l’encadrement. Sur l’abandon du bonus-malus, la CFE-CGC rappelle qu’il faut un dispositif d’encadrement et de régulation des contrats courts.

    L’exécutif va-t-il relancer sa réforme des retraites ?

    Cette réforme, plus personne n’en veut. Sauf la Commission européenne.

    IBM, Danone, Nokia, Michelin et bien d’autres : les annonces de plans sociaux se succèdent. Comment y faire face ?

    Aujourd’hui, on peut affirmer que l’activité partielle de longue durée (APLD) est un dispositif efficace et négocié que soutient la CFE-CGC car il permet le maintien des salariés dans l’entreprise. Il faut développer le dispositif et faire pression sur les directions réticentes à y recourir. Il en va de l’avenir de bon nombre de filières, à l’image de l’aéronautique.

    Propos recueillis par Mathieu Bahuet