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Publié le 06 - 05 - 2025

    ArcelorMittal : la CFE-CGC dénonce « un dégraissage drastique »

    Le géant sidérurgique a annoncé un plan social de sa filiale ArcelorMittal France prévoyant la suppression de 636 postes sur 8 sites. La CFE-CGC fustige une catastrophe sociale et économique. 

    L’avenir s’assombrit pour ArcelorMittal France. Alors que le groupe ArcelorMittal, deuxième sidérurgiste mondial, a engagé un vaste plan d'économie en Europe avec des transferts d’activités vers l’Inde et la Pologne, la filiale française (environ 7 000 salariés) est lourdement frappée. 

    Le 23 avril dernier, la direction d’ArcelorMittal France a annoncé aux organisations syndicales un plan social prévoyant la suppression de 636 postes sur les 8 sites basés à Basse-Indre (Loire-Atlantique), Desvres (Pas-de-Calais), Dunkerque (Nord), Florange (Moselle), Mardyck (Nord), Montataire (Oise), Mouzon (Ardennes) et Saint-Denis (Saint-Denis). Les deux les plus impactés sont ceux de Dunkerque (295 suppressions de postes) et de Florange (194). Toutes les populations de salariés sont concernées dont celles de l’encadrement (cadres, agents de maîtrise, techniciens).

    DES CONSÉQUENCES LOURDES ET IRRÉVERSIBLES SUR LES EFFECTIFS ET L’OUTIL INDUSTRIEL

    « Le groupe fait valoir qu’il doit réduire les coûts et retrouver de la compétitivité en raison des difficultés structurelles de la filière sidérurgique et du contexte économique mondial, explique Pierre Damiani, secrétaire CFE-CGC du CSE central d’ArcelorMittal France et président du syndicat CFE-CGC de la Sidérurgie. Nous connaissons ce contexte mais ne saurions accepter que l’on tire des conséquences aussi lourdes et irréversibles sur les effectifs et notre outil industriel. »

    « Alors que l’Union européenne a lancé un plan acier ambitieux, fondé sur l’accès à une énergie propre et abordable, sur le soutien à l’investissement industriel et à la montée en compétences des salariés, les décisions d’ArcelorMittal France vont à l’encontre de ces orientations stratégiques, analyse Xavier Le Coq, coordinateur syndical CFE-CGC du Groupe ArcelorMittal. Cela revient à utiliser la situation économique européenne compliquée en opportunité de dégraissage drastique des effectifs de l’entreprise. »

    Pour la CFE-CGC, deuxième organisation syndicale d’ArcelorMittal France avec 34,06 % de représentativité, ces décisions auront des conséquences dramatiques : lourd impact social, image de l’entreprise, défiance des salariés et des clients, fuite des talents et perte de compétences clés, coûts cachés souvent sous-estimés (formation, rotation du personnel, erreurs de production, délais logistiques), dégradation de la performance industrielle, etc. 

    Comment comprendre qu’au moment où l’entreprise doit réussir sa transformation industrielle, elle se prive de centaines de compétences clés ? »

    « Comment comprendre qu’au moment où l’entreprise doit réussir sa transformation industrielle, elle se prive de centaines de compétences clés, interroge Pascal Deshayes, délégué syndical central CFE-CGC d’ArcelorMittal France. Comment comprendre qu’au moment où le groupe affiche sa priorité pour la santé, la sécurité, la décarbonation et son attractivité, il s’engage dans un affaiblissement de ses ressources humaines et techniques ? » 

    Dans une déclaration présentée lors du CSEC le vendredi 30 avril, les élus CFE-CGC ont interpelé la direction pour éviter une telle « saignée humaine irréparable », demandant que les salariés « soient reconnus non pas comme des coûts mais comme des forces essentielles pour réussir les mutations de demain ». La CFE-CGC en appelle ainsi à une véritable gestion des emplois et des parcours professionnels en entreprise (GEPP) et à une concertation tournée vers l’innovation, la formation, l’évolution des métiers et la consolidation des savoir-faire. 

    Concernant la mise en œuvre du PSE, les équipes CFE-CGC vont dorénavant travailler site par site, fonction par fonction, emploi par emploi, pour accompagner au mieux les salariés. « Il s’agit aussi d’envisager la future organisation du travail avec les salariés qui resteront, la question des compétences, la productivité et l’efficacité des process, détaille Pierre Damiani. La direction cherche à imposer brutalement son calendrier et à nous laisser peu de temps. C’est très difficile humainement avec de la peur chez les salariés quant à savoir qui va être concerné. »

    UN DOSSIER QUI DEVIENT POLITIQUE

    Symbole d’une filière sidérurgique en grande difficulté (encadré ci-dessous), le dossier ArcelorMittal devient politique. Après avoir sollicité un rendez-vous à Bercy, la CFE-CGC, avec les autres organisations syndicales, a eu un échange direct ce mardi 6 mai avec Marc Ferracci, ministre chargé de l’Industrie et de l'Énergie, et plusieurs élus locaux dont Xavier Bertrand, président du conseil régional des Hauts-de-France.  

    Le calendrier social prévoit désormais une prochaine réunion le mardi 13 mai avec le démarrage du processus d’information-consultation des instances représentatives du personnel. 

    Sidérurgie : une filière en grande souffrance
    La sidérurgie va mal en France et en Europe. « Depuis 2008, l'industrie sidérurgique européenne a connu une baisse sévère et permanente de la demande et des importations atteignant 30 % de part de marché », décrypte Xavier Le Coq, coordinateur syndical CFE-CGC du Groupe ArcelorMittal. Les grosses difficultés actuelles de l’automobile, de la construction et du bâtiment impactent toute la filière. La consommation d’acier diminue en Europe mais le niveau d’importation demeure stable. » 

    Les conséquences sur l’emploi sont tangibles : la branche sidérurgique du groupe allemand ThyssenKrupp a annoncé la suppression de 11 000 emplois d'ici à 2030. Aux Pays-Bas, le groupe indien Tata Steel va supprimer 1 600 emplois. Au Royaume-Uni, British Steel ferme ses derniers hauts fourneaux. Il y a aussi la faillite de Liberty Steel en Belgique dans la région de Liège (550 emplois supprimés).

    « Si la Commission européenne a récemment lancé un plan acier pour maintenir et développer les capacités industrielles européennes dans les secteurs de l'acier et des métaux, il est très difficile de résister et de retrouver de la compétitivité », estime Xavier Le Coq (voir ici en vidéo sa récente intervention sur Sud Radio). 

    Mathieu Bahuet