QUELS EN SONT LES DÉTERMINANTS ?
L’Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT), un établissement public administratif doté d’un conseil d’administration tripartite (représentants des organisations d’employeurs, de salariés et de l’État), liste six grands piliers sur lesquels repose la QVT :
QUEL EST LE CADRE LÉGAL ?
Aboutissement d’une démarche débutée en 2004 avec la négociation sur l’égalité professionnelle, prolongée par les accords sur le stress au travail (2008) puis sur le harcèlement et la violence au travail (2010), l’accord signé en 2013 par les partenaires sociaux a eu le mérite de fournir un cadre d’action. Il inscrit en effet la QVT à l’ordre du jour des négociations annuelles obligatoires (NAO) en entreprise, une disposition confirmée en 2015 par la loi relative au dialogue social et à l’emploi.
Conformément à la réforme du Code du travail (ordonnances Macron), entrée en vigueur en 2018, la négociation obligatoire concerne les entreprises avec une ou plusieurs organisations syndicales représentatives et au moins un délégué syndical (DS). Il s’agit donc des entreprises de plus de 50 salariés (le seuil permettant la désignation d’un délégué syndical) et des entreprises de moins de 50 salariés dès lors qu’un délégué du personnel aura été désigné en qualité de DS.
Si les ordonnances ont maintenu les trois thèmes obligatoires de négociations (dont celui de l’égalité professionnelle et de la QVT), la périodicité de leur négociation n’est dorénavant garantie qu’une fois tous les quatre ans.
LES ENTREPRISES JOUENT-ELLES LE JEU ?
Pas vraiment ! Si la QVT trouve un écho grandissant auprès des salariés et des acteurs du monde du travail, force est de constater que le bilan sur le terrain, en matière d’accords d’entreprises, demeure très contrasté. Quand il s’agit de négocier, de nombreuses entreprises tâtonnent ou font preuve de frilosité, comme l’explique Martine Keryer, secrétaire nationale CFE-CGC en charge de la santé au travail : « Beaucoup d’employeurs ne prennent pas encore la mesure du sujet ou l’abordent sous l’angle biaisé du bonheur au travail. Or ce n’est pas avec un baby-foot, des espaces de convivialité ou la mise en place de responsables du bonheur (chief happiness officers) qu’on traite des vraies problématiques, en particulier l’évaluation de la charge de travail des salariés. »
Face aux phénomènes croissants de désengagement des salariés et de hausse de l’absentéisme au travail occasionnant des coûts substantiels pour les entreprises, celles-ci ont pourtant tout intérêt à répondre véritablement aux enjeux en lien avec les conditions de travail. « Malgré quelques progrès notables comme le développement des accords relatifs au télétravail et la meilleure prise en compte de la conciliation des temps de vie professionnels et personnels, c’est encore très difficile, dans les entreprises, de parler d’organisation du travail, de risques psycho-sociaux (RPS) et d’épuisement professionnel », souligne Martine Keryer. Encore plus avec la disparition du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) dans le cadre de la mise en place des CSE, la nouvelle instance unique de représentation du personnel.
PERCEPTION, DIFFICULTÉS : QU’EN DISENT LES SALARIÉS ?
Commençons par le positif : une majorité de salariés (73 %) se disent satisfaits de leur qualité de vie au travail et 60 % se sentent mieux au travail qu’il y a dix ans, selon le baromètre 2018 santé et QVT du groupe de protection sociale Malakoff Médéric. Les salariés sont notamment moins nombreux à juger leur travail pénible physiquement (48 % contre 54 % en 2009). Notons que la QVT est jugée plus satisfaisante dans les petites entreprises : 45 % des collaborateurs lui attribuent une note entre 8 et 10 dans les TPE, contre 33 % dans les grands groupes.
Toutefois, plusieurs maux persistent. A commencer par le difficile équilibre des temps de vie. Ainsi, 35 % des salariés (vs 27 % en 2009) éprouvent des difficultés à concilier vie personnelle et professionnelle. Pour y remédier, les salariés plébiscitent des horaires de travail plus souples (46 %), une réduction du temps de travail (28 %) et la possibilité de télétravail (24 %). Autre difficulté : « la pression psychologique subie au travail », 68 % des salariés jugeant leur travail nerveusement fatigant. Parmi les griefs exprimés viennent ensuite « une érosion de l’engagement » et surtout « le manque de reconnaissance et/ou d’autonomie » pour plus de 4 salariés sur 10.
Mathieu Bahuet