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Publié le 28 - 03 - 2023

    Comités d’entreprise européens : vers une révision de la directive

    Les organisations syndicales, soutenues par le Parlement européen, ont obtenu de la Commission la révision de la directive sur les CEE, une instance permettant de renforcer le dialogue social au sein d’un groupe.

    Le corpus législatif européen sur la démocratie au travail est un élément clé du modèle social européen dont le dialogue social, la participation des travailleurs et la négociation collective constituent les fondements. Les organisations syndicales européennes et nationales œuvrent de longue date au niveau européen pour consolider ces droits et les rendre effectifs.

    DEUX RAPPORTS DU PARLEMENT EUROPÉEN SUR LA DÉMOCRATIE AU TRAVAIL

    Le Parlement européen s’est associé à cette démarche à travers deux rapports d’initiative lancés en 2021 et visant à inscrire le renforcement de la participation des travailleurs à l’agenda législatif européen :

    • l'un porté par la députée européenne Gabriele Bischoff sur la démocratie au travail et le cadre européen des droits de participation des salariés ;
       
    • l'autre sur la révision de la directive européenne 2009/38/CE relative aux comités d’entreprise européens (CEE), dont le rapporteur est le député européen Dennis Radtke. 

    Ce second rapport, sans proposer une refonte de la directive, apporte des pistes intéressantes pour pallier les carences du texte en vigueur, et propose des pistes intéressantes. Un des enjeux est d’encourager la mise en place de comités d’entreprise européens. S’il en existe aujourd’hui près de 1 000 en activité, il pourrait y en avoir bien plus si les représentants des salariés en faisaient la demande une fois les seuils d’effectifs atteints. Le texte du Parlement prévoit la réduction à 18 mois (contre 3 ans actuellement) pour négocier un accord, ce qui renforcerait la marge de manœuvre du groupe spécial de négociation (GSN) et encouragerait sans doute le lancement des négociations.

    Concernant le rôle des CEE et ses missions, le texte propose une clarification des notions clés de transnationalité et de confidentialité, et de la procédure d’information-consultation. Cela peut sembler anecdotique mais c’est là que se situent les principales difficultés qui rendent parfois moins efficaces cette instance, les directions d’entreprise n’hésitant pas à faire leur propre interprétation des dispositions européennes imprécises dans le but de contourner les obligations leur incombant. 

    Sur le volet des sanctions, parent pauvre du texte actuel, le Parlement souligne la nécessité de prévoir des pénalités financières et la possibilité de priver les entreprises de l’accès aux marchés publics, d’aides financières et du bénéfice de fonds européens en cas de violation de la directive. Le texte va même plus loin en introduisant la suspension de la décision de l’entreprise par voie de procédure judiciaire s’il s’avère que la procédure d’information-consultation n’est pas respectée.

    Dernier point : le texte prévoit l’alignement de tous les accords sur les dispositions de la future directive, ce qui signifie mettre fin aux accords dérogatoires, notamment ceux conclus en septembre 1994 et septembre 1996 (c’est-à-dire dans l’intervalle de temps entre les deux directives qui coexistent à ce jour). Cela aura pour conséquence d’harmoniser la base législative des accords et, pour les membres de CEE dont l’accord est ancien, d’ouvrir des négociations afin de bénéficier des dispositions les plus récentes et les plus protectrices. 

    ENGAGEMENT DE LA COMMISSION EUROPÉENNE ET CONSULTATION DES PARTENAIRES SOCIAUX 

    Les deux rapports d'initiative du Parlement européen ont été adoptés en session plénière, en décembre 2021 pour le rapport Bischoff ; en février 2023 pour le rapport Radtke. La Commission européenne doit désormais légiférer et s’est engagée à le faire d’ici fin 2023. Le commissaire responsable de l'emploi et des droits sociaux, Nicolas Schmit, a ainsi annoncé, le 1er mars dernier, le prochain début de la première phase de consultation des partenaires sociaux européens comme le prévoit l’article 155 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE).

    Après presque 15 ans de mise en œuvre, la directive européenne relative aux CEE s’apprête donc à être révisée. Conformément à la procédure de consultation en deux phases définie par le traité, il appartiendra aux partenaires sociaux européens de déterminer s’ils souhaitent s’emparer du sujet et lancer une négociation ou s’ils s’en remettent à la Commission pour présenter une initiative législative. Il est très probable qu’ils ne négocient pas sur ce sujet, les représentants des employeurs étant tout à fait opposés à cette révision qualifiée par Business Europe, la plus grande organisation européenne patronale, de « contre-productive pour la compétitivité ».

    Quand bien même la Commission respecterait le délai pour présenter sa proposition, le calendrier d’examen législatif risque de s’éterniser, en raison d’une part de l’opposition ferme des organisations d’employeurs à de telles évolutions, et d’autre part aux élections européennes de 2024 qui risquent d’entraîner un ralentissement du travail législatif.

    LA CFE-CGC PRÊTE À PORTER SES PROPOSITIONS POUR RENFORCER LE RÔLE DES CEE

    La mise en place d’un comité d’entreprise européen est une démarche permettant de renforcer le dialogue social au sein d’un groupe. C’est une instance complémentaire aux instances nationales de représentation du personnel, qui s’ajoute aux dispositifs préexistants.

    Convaincue que le CEE peut jouer un rôle essentiel en mettant en présence des représentants des salariés de plusieurs pays et des représentants de la direction au plus haut niveau, la CFE-CGC a forgé une solide doctrine sur la question et ne manquera pas de porter ses propositions à la connaissance des décideurs européens dans la perspective de révision du texte. Avec comme objectif le renforcement effectif de la participation des travailleurs dans les entreprises, et par conséquent le renforcement du dialogue social transnational.

    UN GUIDE CFE-CGC SUR LES CEE

    Pour ses structures, la CFE-CGC met à disposition un guide technique sur les comités d’entreprise européens et les comités de la société européenne. N’hésitez pas à le partager auprès de vos collègues !

    Sonia Arbaoui