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Publié le 19 - 12 - 2022

    Tirer les leçons de la crise de l’énergie

    Dans une tribune, Alexandre Grillat, secrétaire national aux affaires publiques de la Fédération CFE Énergies, en appelle à une nécessaire réorientation de la construction européenne de l’énergie, et évoque les enjeux en France.


    Depuis 2021, l’Europe est confrontée à une crise des prix de l’énergie sans précédent du fait de la reprise post-Covid, avec des tarifs électricité et gaz qui flambent sur les marchés européens, atteignant des niveaux insupportables pour les entreprises comme les citoyens. La crise russo-ukrainienne n’a fait qu’aggraver la crise de l’énergie par un risque de pénurie du fait des tensions croissantes sur la sécurité des approvisionnements énergétiques de l’Europe.

    Dans nombre de capitales européennes, l’urgence conduit à prendre des mesures de boucliers tarifaires aussi protecteurs que bienvenus, et de mécanismes de soutien financier aux entreprises. Mais souvent en ordre dispersé, au risque de créer de véritables distorsions de concurrence entre les différentes économies européennes. Le plan de soutien allemand à l’économie de 200 milliards d’euros en est la parfaite illustration.

    Si cette crise devait durer, et c’est bien parti pour, les États auront alors bien du mal à maintenir durablement ces dispositifs de soutien vu leur coût pour les finances publiques. Au risque de ne plus pouvoir éviter une débâcle industrielle du fait de l’écart de compétitivité énergétique entre l’Europe et le reste du monde, car ce n’est que sur le Vieux Continent que les prix de l’énergie grimpent à ce point. Ce sont alors les délocalisations des industries, en particulier les « énergo-intensives », qui pourraient pointer le bout de leur nez. Une catastrophe industrielle doublée d’une crise sociale, sans même parler de l’abandon de souveraineté économique.

    Revoir de fond en comble le marché européen de l’énergie

    Il y a donc urgence à aller au-delà des mesures de circonstance et à revoir de fond en comble le marché européen de l’énergie. La présidente de la Commission européenne le reconnaît elle-même : le marché dysfonctionne et il faut le réparer, quitte à s’asseoir sur 30 ans de dogmes libéraux à Bruxelles. Les résistances sont toutefois nombreuses dans les services de la Commission et dans des pays qui ne jurent que par le libre-échange. Le marché guidé par la seule concurrence libre et non faussée n’est pas une fin en soi et, dans le secteur de l’énergie, une application quasi-religieuse de la loi du marché peut nous faire passer à côté de l’essentiel : construire une vision de long terme assurant la sécurité des approvisionnements et la neutralité carbone.

    C’est bien là l’enjeu des prochains mois : réorienter la construction européenne de l’énergie pour quitter la religion du marché et revenir aux priorités de toute politique énergétique. La CFE-CGC prend une part active dans ce débat car il en va de l’avenir de l’industrie française et de la prospérité économique du pays.

    En France, l’actualité est rythmée par les débats sur les choix de politique énergétique. Au-delà de défendre un bouquet énergétique diversifié, gage de résilience, la CFE-CGC considère que les choix énergétiques ne sauraient être livrés aux calculs politiciens et à une pensée hors-sol, à savoir éluder les impératifs de dynamique industrielle et sociale.

    Bâtir une politique énergétique fondée excessivement sur des importations d’équipements n’est bon ni pour le climat, ni pour les emplois. Il faut faire des choix qui reposent sur la maîtrise des écosystèmes industriels, créateurs d’emplois durables et qualifiés pour les citoyens, et exemplaires quant au climat et la biodiversité.

    Alors que la COP 27 s’est conclue par un accord bien peu ambitieux sur la réduction des émissions de CO2, la politique énergétique de la France doit être pragmatique, à la fois sur les plans industriel, social et climatique. C’est ce que la CFE-CGC défendra lors du marathon législatif engagé au Parlement avec les lois d’accélération dans les énergies renouvelables et le nucléaire qui seront suivies, au printemps 2023, de la Stratégie française énergie-climat (SFEC). 

    Alexandre Grillat, secrétaire national aux affaires publiques de la Fédération CFE Énergies