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Publié le 02 - 07 - 2025

    Directive de l'UE sur la transparence salariale : la CFE-CGC mobilisée

    Les partenaires sociaux discutent avec le ministère du Travail de la future transposition de la directive sur la transparence des salaires. État des lieux avec Christelle Toillon, déléguée nationale CFE-CGC à l’égalité professionnelle.

    Le ministère du Travail a lancé le 21 mai dernier un cycle de réunions avec les organisations syndicales et patronales concernant la transposition, d’ici juin 2026 dans le droit français, de la directive européenne de mai 2023 sur la transparence des salaires. Quel en est le format ?

    Cela faisait un an que nous attendions d’échanger avec la Direction générale du travail (DGT). Le contexte politique de 2024 a fait perdre beaucoup de temps et les travaux engagés se font à marche forcée pour finir a priori le 24 juillet. Il s’agit non pas d’une négociation nationale interprofessionnelle mais d’une concertation, sachant que le projet de loi doit être présenté à l’automne au Parlement. Pour cette concertation, la délégation CFE-CGC (ndlr : composée des déléguées nationales Christelle Toillon et Marielle Mangeon) s’appuie sur le travail du réseau « Les Elles », constitué de représentants CFE-CGC (fédérations et unions régionales) sur l’égalité professionnelle.

    Quels sont les enjeux de la future transposition ?

    La transparence salariale va aider l’ensemble des salariés, femmes et hommes, à se positionner. Ils auront accès à des informations obligatoires relatives à la politique de rémunération au sein de leur entreprise. La directive européenne revient par ailleurs sur la notion de « à travail de même valeur, salaire de même valeur » inscrite dans le droit français depuis 1972. Pour la CFE-CGC, les critères doivent être correctement définis car ce sera la base de comparaison entre les salariés. Autre enjeu : ne pas perdre les acquis de l’actuel index de l'égalité professionnelle en vigueur en France.  

    Qu’en est-il justement de l’évolution de cet index ?

    Ce que dit la DGT à date, c’est qu’on enlève les 5 indicateurs de l’index pour les remplacer par les 7 critères de la directive européenne. Si l’index a permis d’enclencher un mouvement sur l’égalité salariale, les chiffres montrent que nous sommes sur un plat et que les choses ne progressent plus.

    Pour l’heure, les entreprises s’informent sur la directive, avec des cabinets de conseil. La question des seuils est épineuse : alors que l’index actuel est une obligation pour les entreprises de plus de 50 salariés, la directive prévoit que les critères soient calculés dans celles qui ont au moins 100 salariés. Dans le cadre de la concertation, les organisations patronales indiquent qu’elles ne veulent pas de surtransposition et qu’elles sont contre l’application de l’index dès le seuil des 50 salariés. La partie patronale essaie aussi d’alléger les obligations liées à la publication, dans les offres d’emploi, des salaires moyens pratiqués. Et elle est défavorable à l’interdiction faite aux employeurs, prévue par la directive, de demander les salaires antérieurs aux candidats.

    Prendre en compte les effets du plafond de verre et du plancher collant dont sont victimes les femmes en entreprise »

    Quelles sont les principales revendications de la CFE-CGC ?   

    La CFE-CGC milite pour l’intégration d’un indicateur permettant de visualiser l’impact dynamique des parcours professionnels, un indicateur qui avait été supprimé de l’index. Cela permettrait notamment de prendre en compte les effets du plafond de verre et du plancher collant dont sont victimes les femmes en entreprise.  

    Par ailleurs, la directive prévoit l’obligation d’augmentation salariale au retour du congé de maternité mais le déclenchement est tardif selon le seuil d’effectif des entreprises. Or le sujet est fondamental car toutes les études montrent que les écarts de rémunération se creusent en défaveur des femmes à l’arrivée du premier enfant.

    Nous proposons également que les définitions des critères « de même travail ou de travail de même valeur », prévus par la directive, soient en priorité négociés, par défaut, dans les branches professionnelles. Avec toutefois certains aménagements tels que la possibilité de les négocier dans les entreprises de plus de 1 000 salariés (si celles-ci sont dotées d’une commission économique) et l’obligation de les négocier dans les entreprises de plus de 3 000 salariés et dans celles (sans condition d’effectif) où coexistent plusieurs conventions collectives et/ou statuts.

    Qu’en est-il des retraites ?

    Alors que les pensions de droit direct des femmes sont inférieures de 40 % à celle des hommes, la CFE-CGC propose la prise en compte, s’agissant des pensions, des indemnités compensatrices pour les femmes qui auraient été victimes de discriminations en termes de rémunération.

    Formaliser une information-consultation du CSE pour présenter le plan d’action relatif aux écarts de rémunération dans l’entreprise »

    Quid des sanctions infligées aux entreprises ?

    Nous avons demandé que les pénalités soient fonction du chiffre d’affaires mondial plutôt que de la masse salariale, comme cela se fait concernant le montant des sanctions pour violation du règlement général de protection des données (RGPD). Il faut taper plus fort pour déclencher une véritable prise de conscience par les employeurs, alors que la loi existe depuis plus de 50 ans !

    Dans quelle mesure les représentants du personnel et les CSE pourront-ils s’emparer de ces sujets ?

    La thématique a commencé à être évoquée mais demeure assez floue en l’état. Les élus du personnel seront associés dans la définition des critères de même travail ou de travail de même valeur. Ils pourront agir quant au septième indicateur de la directive européenne (écart de rémunération entre les femmes et les hommes par catégorie de travailleurs, ventilé par salaire ou traitement ordinaire de base et par composantes variables ou complémentaires) si les résultats s’avèrent mauvais. Pour la CFE-CGC, il doit y avoir une information-consultation du CSE pour présenter le plan d’action relatif aux écarts de rémunération dans l’entreprise.

    Propos recueillis par Mathieu Bahuet