QUEL EST LE CSE CONCERNÉ ?
Dans les entreprises structurées en établissements distincts, la répartition des compétences entre le comité social et économique central (CSEC) et les autres CSE est clarifiée par l’ordonnance n°2017-1386 du 22 septembre 2017 « relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l'entreprise et favorisant l'exercice et la valorisation des responsabilités syndicales ». Par exemple, lorsque le CSE central est le seul consulté, lui seul peut procéder à la désignation d’un expert.
QUEL EST LE CADRE GLOBAL AVEC L’EMPLOYEUR ?
Par le biais d’un accord d’entreprise ou à défaut d’un accord entre l’employeur et le CSE, les deux parties déterminent le nombre d’expertises auquel le CSE a droit dans le cadre de ses consultations récurrentes et sur une période donnée. En l’absence d’accord, des dispositions supplétives s’appliquent. En dehors des consultations récurrentes, le CSE peut faire appel, selon les cas, à un expert-comptable, à un expert habilité ou à « tout type d’expert ».
RECOURS À UN EXPERT-COMPTABLE DANS LE CADRE DES CONSULTATIONS RÉCURRENTES
Le CSE peut recourir à un expert-comptable dans le cadre des trois consultations récurrentes :
1/ Orientations stratégiques de l’entreprise : l’expert aide le CSE à rendre son avis et peut l’aider à formuler des orientations alternatives.
2/ Situation économique et financière : l’expert examine les comptes et documents des sociétés mères ou des filiales. Il analyse l’environnement économique, dans la limite de sa mission. Il rédige et remet au CSE un rapport permettant de comprendre les comptes et la situation de l’entreprise.
3/ Politique sociale, conditions de travail et d’emploi : l’expert aide le CSE à analyser les éléments fournis par l’employeur dans le cadre de la base de données économiques et sociales (BDSE). L’éventail des sujets est extrêmement large : évolution de l’emploi, qualifications, formations, apprentissage, conditions de travail, congés, aménagement du temps de travail, égalité professionnelle hommes-femmes, etc.
Autres cas de recours à l’expert-comptable
- Opération de concentration.
- Exercice du droit d’alerte économique.
- Procédure de licenciement collectif pour motif économique.
- Licenciement collectif avec fermeture d’un site.
- Offre publique d’acquisition.
- Examen du rapport relatif à l’accord de participation.
- Assistance de la commission économique du CSE (obligatoire dans les entreprises d’au moins 1 000 salariés).
- Négociation d’un accord collectif.
RECOURS À UN EXPERT HABILITÉ
La loi prévoit le recours à un expert habilité en matière de santé et sécurité, dans des circonstances similaires à celles qui existaient en matière d’expertises pour le CHSCT. Le CSE peut le désigner dans les cas suivants :
- Lorsqu’un risque grave (accident du travail, maladie professionnelle…), identifié et actuel, est constaté dans l’établissement.
- En cas d’introduction de nouvelles technologies ou projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou de travail.
- En vue de préparer la négociation sur l’égalité professionnelle dans les entreprises d’au moins 300 salariés.
RECOURS À D’AUTRES EXPERTS
Pour la préparation de ses travaux, le CSE peut faire appel à tout type d’expertise rémunéré par ses soins. Un « expert libre » n’a quasiment pas de conditions à remplir. Il peut être une personne physique ou une société, un ancien salarié de l’entreprise, un permanent d’une organisation syndicale, un fonctionnaire, un avocat, un salarié d’une autre entreprise. Il peut participer aux réunions du CSE au cours desquelles sont examinées les questions qui entrent dans le cadre de sa mission et faire valoir son point de vue (mais pas voter). Il ne peut exiger de l’employeur aucune information spécifique et n’est pas habilité à enquêter directement auprès des salariés.
COÛT DE L’EXPERTISE
Selon le type d’expertise, le coût du recours à un expert est supporté par l’employeur, le CSE ou par les deux à la fois. Le financement par le seul employeur concerne les expertises suivantes :
- Consultations récurrentes sur la situation économique et financière et sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi.
- Licenciements collectifs pour motif économique.
- Risque grave, identifié et actuel.
- Préparation de la négociation sur l’égalité professionnelle (entreprises d’au moins 300 salariés).
Le cofinancement (employeur à 80 %, CSE à 20 %) concerne la consultation sur les orientations stratégiques et les consultations ponctuelles autres que celles citées ci-dessus. Le financement incombe au CSE pour tout autre type d’expertise.
CHOIX DE L’EXPERT
L’expert-comptable doit être inscrit au tableau de l’Ordre des experts-comptables, mais pas forcément dans le ressort de la cour d’appel du siège de l’entreprise. L’expert habilité doit être titulaire d’une certification délivrée par un organisme certificateur accrédité et justifiant de ses compétences en matière de santé, sécurité et conditions de travail.
Le CSE est totalement libre du choix de l’expert dès lors qu’il a la qualité requise. Sa désignation doit être inscrite à l’ordre du jour du CSE. En cas de litige sur la fixation de l’ordre du jour, un juge des référés peut être saisi. L’employeur ne peut pas s’opposer directement à la désignation d’un expert, mais il peut contester sa régularité, son opportunité et son moment. Il peut saisir le tribunal judiciaire s’il estime que cette désignation a été faite irrégulièrement ou que ses conditions ne sont pas remplies.
DÉLAI DE DÉSIGNATION DE L’EXPERT
Les dispositions légales ne prévoient pas le moment où l’expert doit être désigné. En revanche, des jurisprudences tendent à montrer qu’il est toujours possible au CSE de désigner un expert même quand « un projet important » a été finalisé.
Dans le cas particulier de la consultation sur la situation économique et financière de l’entreprise, le droit de recourir à un expert-comptable doit s’exercer dans un « délai raisonnable » à partir du moment où les comptes sont transmis au CSE, mais pas forcément lors de la réunion d’information où ils le sont. Si l’expert est désigné après l’approbation des comptes, sa désignation est considérée comme tardive et l’employeur n’a pas à en supporter le coût. Même chose si elle est prématurée comme 15 jours avant la présentation des comptes.
NOTIFICATION À L’EMPLOYEUR
L’expert a 3 jours après sa désignation pour demander à l’employeur toutes les informations qu’il juge nécessaires et celui-ci en a 5 pour lui répondre. L’expert doit notifier à l’employeur le coût prévisionnel, l’étendue et la durée de son expertise dans un délai de 10 jours à compter de sa désignation. Le CSE peut « au besoin », donc de façon facultative, établir et notifier à l’employeur un cahier des charges de la mission de l’expert.
DÉLAI DE REMISE DE L’EXPERTISE
Le rapport dans lequel l’expert synthétise ses conclusions doit être remis dans des délais précisés par accord d’entreprise ou par accord entre le CSE et l’employeur. À défaut d’accord, le Code du travail définit certains délais, par exemple 8 jours dans le cadre d’une opération de concentration à compter de la décision de l’Autorité de la concurrence ou de la Commission européenne saisie du dossier.
CONTESTATION DE L’EXPERTISE PAR L’EMPLOYEUR
L’employeur peut, dans un délai de 10 jours, saisir le juge s’il contexte la nécessite de l’expertise, son coût, son cahier des charges, son étendue, sa durée ou le choix de l’expert. Ses décisions ne sont, dans la plupart des cas, pas susceptibles d’appel, mais elles peuvent faire l’objet de pourvoi en cassation. En cas d’annulation définitive par la justice de la délibération du CSE, l’expert doit rembourser l’employeur des sommes perçues. Le CSE peut décider de les prendre en charge.
Gilles Lockhart