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Publié le 15 - 10 - 2020

    Pression et manque d’effectifs : le quotidien des cadres de la Fnac

    Ils sont au four et au moulin du matin au soir. Avec des amplitudes de travail de plus en plus grandes et des collaborateurs de moins en moins nombreux. Focus sur les cadres du réseau Fnac.

    L’alerte a été donnée par un communiqué de presse commun du 25 septembre sur le thème de la souffrance au travail. Signé par les représentants des cinq organisations syndicales représentatives de Fnac Relais, dont Laurence Gnonlonfoun (photo ci-contre), déléguée syndicale centrale (DSC) et vice-présidente de la fédération CFE-CGC Commerce. Alerte redonnée serait plus juste car ce n’est pas la première fois que l’élue évoque la dégradation des conditions de travail. Et ce n’est pas de gaité de cœur : « Comme la quasi-totalité de mes collègues, j’ai un fort attachement à l’enseigne et j’hésite à communiquer sur des problèmes internes par égard pour les clients. Seulement, de mauvaises conditions de travail finissent toujours par se traduire sur les clients, donc il faut prendre la parole… »

    Réductions d’effectif, déprofessionalisation et pression incessante sur les cadres sont au menu social de la Fnac. Si le directeur général actuel de l’enseigne, Enrique Martinez, vient de déclarer qu’il croyait « beaucoup au rôle du magasin » (en complément des ventes sur internet), dans la pratique, depuis quatre ans, les départs non remplacés ont frappé le réseau commercial et on se souvient d’une rude diminution du nombre des cadres opérée en 2011.

    Concrètement en 10 ans, certains magasins ont connu une réduction globale d’effectifs de plus de 50 % avec parfois 70 % de baisse du nombre d’encadrants. La plupart fonctionnent maintenant avec un staff de management hyper réduit, « réorganisation qui n’est même pas passée en comité social et économique (CSE) », souligne Laurence Gnonlonfoun. Les ressources humaines ont été mutualisées par grappes de trois ou quatre magasins de province. « La situation devient critique quand les salariés qui partent ne sont pas remplacés. Du coup, les cadres sont obligés de compenser et de faire l’ouverture et la fermeture des magasins, ce qui signifie être présent à 7h30 quand les camions de livraison arrivent, assurer une partie de la manutention eux-mêmes, les encaissements, la délivrance des achats, etc., et faire leur job ensuite jusqu’à 19h30. S’il y a le moindre absent parmi le personnel, le moindre grain de sable, c’est très compliqué… »

    Autre symptôme de la perte de professionnalisation : le fait que la gestion de la masse salariale ait été retirée aux chefs de département et soit désormais centralisée. Dans le même esprit, les achats de livres ou de produits techniques sont devenus très « chartés », très encadrés, avec de moins en moins de marge de manœuvre locale. L’accent est mis sur la vente de services (garanties, assurances, cartes d’adhérent, etc.) au détriment du travail sur l’assortiment local ou de l’attribution par exemple des « coups de cœur de la Fnac », qui sont une des saveurs de l’enseigne. « On a l’impression qu’on passe notre temps à ranger des marchandises et à régler des urgences, et qu’on n’a plus aucun moment pour réfléchir à la satisfaction des clients », résume la déléguée syndicale centrale CFE-CGC.

    Gilles Lockhart