Retour aux actualités précédentes
Publié le 30 - 06 - 2020

    Chez Framatome, un dialogue social intense

    Par Stéphanie Sautereau, déléguée syndicale centrale (DSC) CFE-CGC chez Framatome, DSC de l’établissement de Lyon.

    Confrontés à une crise hors norme, la CFE-CGC et ses militants s’activent au quotidien dans les branches professionnelles et les entreprises pour faire vivre un dialogue social plus indispensable que jamais. Témoignages
     

    CONTINUITÉ DU SERVICE

    « Le secteur de l’énergie ne s’est pas arrêté avec le confinement. Tout comme EDF, notre maison-mère à qui nous fournissons des chaudières nucléaires et du combustible, nous avons été soumis à l’obligation de continuité du service. Celle-ci portait notamment sur la maintenance des centrales en France et à l’étranger et sur la fabrication du combustible fissible qui alimente le cœur des réacteurs. Autrement dit, nos 11 sites de production (forge au Creusot, usines de composants à Saint-Marcel, usines de « fuel » nucléaire, etc.) ont continué à fonctionner avec des salariés sur place. Quant à nos deux gros sites tertiaires d’environ 2 000 salariés à Paris et 1 400 à Lyon (où je suis moi-même basée dans la partie « Contrôle-Commande »), ils sont passés quasi intégralement en télétravail avec seulement une vingtaine de personnes restant sur chaque site. »

    DES SALARIÉS ROMPUS AUX ÉQUIPEMENTS DE PROTECTION INDIVIDUELS

    « Un avantage, si l’on peut dire, de notre métier, c’est que sur les sites de production et au sein de nos équipes de maintenance dans les centrales électriques, les salariés travaillent déjà avec des équipements de protection individuels : combinaisons, masques FFP2… Ils savent s’équiper, passer à travers des appareils de mesure, prendre des précautions quotidiennes. Cela a certainement facilité la mise en place des plans de continuité d’activité élaborés au début de la crise et qui ont identifié les métiers indispensables et critiques. »

    LES ÉLUS SUR TOUS LES FRONTS

    « Très clairement, cette période de confinement-déconfinement aura été intense en matière de dialogue social. Nous avons eu des réunions CSE (comité social et économique) presque toutes les semaines sur la quasi-totalité de nos sites, des CSE centraux toutes les deux semaines et quantité de CSSCT (commission santé, sécurité et conditions de travail). Nous avons essayé d’envoyer à nos adhérents et militants des résumés de CSE au moins une fois par semaine. Nous avons eu de très nombreux salariés au téléphone et par email. Des personnes qui avaient besoin d’exprimer un ressenti, une difficulté. Par exemple, des nouveaux embauchés qui voyaient leur période d’essai renouvelée et qui ne comprenaient pas ou le prenaient mal. Des personnes pour qui le télétravail ne se passait pas bien. Un peu de tout. Les élus n’ont pas arrêté ! »

    ACCORD SUR LES MESURES LIÉES AU COVID

    « La CGT n’a pas signé l’accord du 3 avril portant sur les mesures liées au Covid, ni son avenant ajouté dans la troisième semaine de mai. Mais, de toute façon, avec la CFDT, nous sommes majoritaires à plus de 60 %. Malheureusement et pour des raisons que je ne comprends pas bien, nous n’avons pas obtenu d’indemnité pour les salariés en télétravail. C’est d’autant plus étonnant qu’EDF a accordé 100 euros à situation comparable. En revanche, nous avons obtenu 90 % du salaire pour les personnes qui étaient en situation contrainte au début du confinement (garde d’enfants, personnes à risque, etc.) et qui ont réintégré le chômage partiel au 1er mai. Nous avons également négocié le paiement des heures supplémentaires des techniciens et agents de maîtrise en télétravail. Autre petite disposition : la possibilité de se faire rembourser des fournitures acquises pour le travail à domicile (cartouches d’imprimante, clés USB…) sur présentation de factures et après validation du management. »

    DÉCONFINEMENT PAR ROULEMENT

    « Depuis la levée partielle du confinement, la direction essaye de faire revenir un peu les tertiaires, avec un objectif de 160 personnes par site pour le début. L’idée est de procéder par roulement, non pas tellement pour faire repartir l’activité, vu que celle-ci ne s’est pas arrêtée, mais plutôt pour que des salariés dont le télétravail n’est pas la tasse de thé puissent revenir en présentiel. L’avenant évoqué prévoit une renégociation de notre accord de télétravail, un sujet pour lequel la CFE-CGC bataillait depuis deux ans et contre lequel la direction était très frileuse. Elle n’arrivait pas à le mettre en place sur les sites de production. Or l’expérience récente lui a permis de s’apercevoir que la productivité a augmenté jusqu’à 8 % dans certaines business units ! Que les personnes ont été consciencieuses, que les livrables et les « jalons » ont été tenus, qu’on pouvait faire confiance aux salariés sans se croire obligé de les surveiller visuellement. L’avenant prévoit d’ailleurs la construction d’un questionnaire (comment ont-ils vécu la période ? Ont-ils disposé de suffisamment de moyens ?) que nous enverrons aux salariés avant de lancer la négociation. »

    POINTS DE VIGILANCE

    « Le Groupe a indiqué que ses objectifs financiers devraient être atteints, ce qui signifie que le paiement de l’intéressement est maintenu en mai, que l’augmentation de salaire négociée en janvier sera accordée en juin et que la part variable sera un peu décalée dans le temps mais pas remise en cause. A contrario, je crains que cette bonne tonalité générale n’incite la direction à augmenter les cadences et à faire revenir plus de monde sans précautions. Je suis aussi vigilante sur les entretiens individuels à mi-année, qui ne concernaient auparavant que les salariés volontaires et qui ont été systématisés avant le mois de septembre. Il ne faudrait pas que les managers en profitent pour augmenter arbitrairement les objectifs ni pour retenir contre certaines personnes le fait qu’elles n’auraient pas assez travaillé à domicile. Surtout quand on connaît les circonstances : gardes d’enfants, problèmes de connexion, manque d’ordinateurs dans le foyer etc. »

    Propos recueillis par Gilles Lockhart