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Publié le 25 - 06 - 2020

    Chez Nokia, un plan de rupture qui tue l’avenir

    Entretien avec Olivier Marcé, responsable syndical CFE-CGC du groupe Nokia.

    Une chape de plomb s’est abattue sur les salariés de Nokia le 22 juin suite à l’annonce brutale d’un nouveau plan social concernant 1 233 postes, soit 1/3 des effectifs français. L’intersyndicale CFDT – CGT – CFE-CGC a organisé un rassemblement le 23 juin devant le site de Nokia à Lannion (Côtes-d'Armor), alors qu’une délégation rencontrait dans l’après-midi à Bercy le cabinet d’Agnès Pannier-Runacher secrétaire d'État auprès du ministre de l'Économie et des Finances.

    La CFE-CGC se mobilise pour défendre l’emploi et les compétences. Olivier Marcé, responsable syndical au sein du groupe Nokia à Nozay (Essonne), répond à nos questions.

    Alcatel-Lucent a été racheté en 2015 par Nokia. Comment en sommes-nous arrivés à la situation actuelle ?

    Olivier Marcé : Lors du rachat il y a cinq ans, des engagements sur l’emploi et la place de la France en matière de R & D ont été pris entre Nokia et le gouvernement français. Depuis, il y a eu un suivi régulier de ces engagements. Le gouvernement considérait qu’ils étaient respectés à la lettre et, aujourd’hui pas « dans l’esprit ». Pour la CFE-CGC, ils n’étaient respectés à aucun niveau. D’ailleurs, nous avons transmis en 2019 une note au ministère qui annonçait ce qui vient de se passer.

    La secrétaire d’Etat avait cependant soulevé en novembre 2019 les problèmes de gouvernance : des salariés français devaient être à des postes clés et la France devait être correctement défendue dans les arbitrages. Nokia n’a pas tenu ses engagements et les quelques responsables ont été débarqués brutalement. Jusqu’à présent, à ma connaissance, le gouvernement n’a pas exercé de pressions sur Nokia pour que ça change.

    Il s’agit donc du quatrième plan social en cinq ans...

    En effet, nous avons déjà eu trois Plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) qui se sont soldés par le départ de 1 200 personnes. Actuellement, nous sommes 5 100 salariés et la filiale visée dans le plan annoncé compte 3 800 salariés. La direction souhaite supprimer 400 postes à Lannion et 800 à Nozay. Ce qui est très inquiétant, c’est que ce plan est plus qu’un plan social. C’est un plan en rupture, qui tue l’avenir, car les postes concernés sont à 83 % des postes de R & D (cloud, 5G, cyber sécurité). Il y aura donc une vraie perte des savoir-faire et des compétences. Pour la CFE-CGC, si ce plan se met en œuvre, il sera rapidement suivi d’un nouveau plan dans l’année ou dans les deux ans : ce ne sera plus 1 200 mais cette fois 2 500 personnes qui seraient concernées. Il ne restera plus aucune fonction de R & D et nous perdrons tout notre patrimoine numérique et technologique.

    Comment s’est déroulée la réunion du 22 juin à Bercy ?

    L’intersyndicale a demandé à rencontrer en urgence Agnès Pannier-Runacher. C’était une première réunion destinée à partager nos réflexions et balayer les options qui se présentent.  Nous avons eu l’impression que nos interlocuteurs étaient surpris et qu’ils ont enfin compris l’ampleur du plan en raison des activités visées. Leur désarroi était palpable.

    Quels sont vos points de vigilance ?

    Nous travaillons de concert avec les autres organisations syndicales. Il faut anticiper et ramener Nokia à de meilleures intentions. Sinon il faudrait préparer la reconversion de 2 500 ingénieurs français. Faute de quoi, nous les perdrons, ce qui n'est pas envisageable.

    Propos recueillis par Cecilia Escorza
     

    LE CALENDRIER DES PROCHAINES ÉTAPES

    • 30 juin : action de l’intersyndicale sur le site de Nozay
    • 4 juillet : manifestation à Lannion
    • 6 juillet : première réunion sur le PSE.
    • 8 juillet : manifestation qui se dirigera vers l’ambassade de Finlande à Paris.
    • 8 juillet : manifestation qui se dirigera vers l’ambassade de Finlande à Paris.