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Publié le 13 - 06 - 2025

    Retraites : un accord encore très incertain

    Les réunions du 11 et du 12 juin entre partenaires sociaux ont permis des ouvertures (situation des femmes, usure, pénibilité) mais un recul de l’âge légal de départ est exclu par la partie patronale. Tout se jouera lors de la dernière séance le 17 juin.

    La délégation paritaire permanente parviendra-t-elle à un projet d’accord ? Un texte est en tout cas sur la table et tout reste ouvert à l’issue des deux réunions de mercredi et jeudi entre les cinq organisations engagées dans la négociation (CFE-CGC, CFDT, CFTC, MEDEF et CPME), et alors qu’une ultime séance est programmée le mardi 17 juin.

    « Selon moi, il perdure une voie de passage, étroite certes mais réelle, pour déboucher sur un projet d’accord, à condition que la partie patronale y mette du sien avec des efforts qui soient réellement partagés, ce qui est loin d’être garanti à ce stade », résume Christelle Thieffinne, secrétaire nationale à la protection sociale et cheffe de file CFE-CGC de la négociation.

    LA PARTIE PATRONALE INFLEXIBLE SUR L’ÂGE LÉGAL DE DÉPART

    Lors des deux réunions, les partenaires sociaux ont discuté sur la base d’un document de synthèse récapitulant les constats chiffrés et les propositions de chaque organisation (âge de départ, pénibilité, pensions des femmes, équilibre et pilotage du régime…) depuis le lancement des travaux le 27 février dernier. Très prudent jusqu’alors sur ses intentions, le MEDEF avait enfin dévoilé, mardi 10 juin, ses propositions, avec notamment un refus d'abaisser l'âge légal de départ fixé à 64 ans. Un gros point de crispation tant cette mesure, entérinée par la réforme de 2023 et combattue par les organisations syndicales, reste injuste et inefficace.

    AMÉLIORER LA SITUATION ET LA PENSION DES FEMMES

    Au sujet des femmes, une thématique portée inlassablement par la CFE-CGC depuis le début du conclave, une piste émerge avec la proposition d’améliorer le mode de calcul du salaire annuel moyen des mères qui sert au calcul de la pension de retraite. Mais pour la CFE-CGC, cette proposition ne doit absolument pas remplacer, comme le voudrait la partie patronale, le dispositif de surcote déjà existant dans la réforme de 2023.

    SENIORS, USURE PROFESSIONNELLE, PÉNIBILITÉ, ÉQUILIBRE FINANCIER : DES PROPOSITIONS À TRANCHER  

    Sur l’usure professionnelle et la pénibilité, la proposition de la CFE-CGC de simplifier l’accès à la retraite anticipée pour incapacité aux personnes victimes de risques psychosociaux (RPS) a été intégrée au texte mais fait toujours l’objet de réticences des organisations patronales. La CFE-CGC a également insisté sur la nécessité de mettre en place des indicateurs d’efficience aux aides versées par le FIPU (Fonds d’investissement pour la prévention de l’usure professionnelle) aux entreprises pour faire de la prévention.

    S’agissant de l’emploi des seniors, la proposition d’opposabilité de la retraite progressive portée par la CFE-CGC figure bel et bien dans le projet de texte mais doit encore être débattue d’ici au 17 juin.

    Enfin, concernant l’équilibre financier du système de retraites, le texte mentionne diverses pistes pour des efforts partagés (salariés, entreprises, retraités), là aussi à trancher dans les prochains jours.

    Rendez-vous désormais le mardi 17 juin pour la réunion conclusive.

    L’ANALYSE DE CHRISTELLE THIEFFINNE, SECRÉTAIRE NATIONALE CFE-CGC À LA PROTECTION SOCIALE ET CHEFFE DE FILE DE LA NÉGOCIATION

    « Le MEDEF a complètement fermé la porte à un abaissement de l’âge légal de départ, ce qui a fait l’effet d’un pavé dans la mare alors que ce sujet demeure un vrai problème. Pour autant, la CFE-CGC négocie et négociera jusqu’au bout pour tenter de corriger les effets les plus injustes de cette réforme inepte et obtenir de véritables avancées sur d’autres sujets capitaux comme la pension des femmes, l’usure professionnelle, la prise en compte des risques psychosociaux, l’emploi des seniors et la retraite progressive. »

    « Concernant la situation des femmes, tout ce qu’a porté la CFE-CGC depuis le début des travaux a véritablement marqué les esprits. Si accord il y a, il y aura bien un chapitre dédié. En revanche, la proposition sur la table d’améliorer le mode de calcul du salaire annuel moyen (SAM) des mères - qui sert au calcul de la pension de retraite - ne doit pas remplacer, comme le souhaite le MEDEF, le dispositif de surcote parentale déjà prévu par la réforme de 2023. Le compte n’y serait pas, ce serait un bilan financier à somme nulle ! Les deux mesures doivent se combiner en faveur des femmes. »

    « Sur l’usure professionnelle et la pénibilité, la reconnaissance des risques psychosociaux pour permettre aux individus concernés de faire valoir leur droit à partir plus tôt en retraite serait une première avancée très significative. Par ailleurs, il faut bien comprendre que quand on arrive à 59 ou 60 ans, on doit pouvoir partir à la retraite si l’on est victime d’une usure découlant de problématiques physiques. Or aujourd’hui, les propositions alternatives patronales ne sont pas à la hauteur. »

    « S’agissant de l’équilibre financier du système de retraites, force est de constater que la notion d’efforts partagés telle que perçue par la partie patronale est et demeure une grosse crispation. »

    « En conclusion, il y a désormais un texte sur la table avec de nombreuses options et alternatives inscrites noir sur blanc. La CFE-CGC continuera de faire valoir ses propositions constructives et réalistes. Mon exigence est à la hauteur des points de barrage que nous fait le MEDEF avec son refus de revenir sur l’âge légal. Parvenir à un projet d’accord ne sera possible que si la partie patronale fournit son effort d’ici le 17 juin. »

    Mathieu Bahuet