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Publié le 12 - 12 - 2018

    Transformer la contrainte du CSE

    Gilles Lécuelle dresse un premier bilan des accords de mise en place du conseil social et économique (CSE), la nouvelle instance unique de représentation du personnel dans les entreprises, et décrypte les nouveaux enjeux des négociations.  

    Plus de 10 000 accords ont déjà été signés sur la mise en place du CSE (ordonnances Macron), qui doit intervenir dans toutes les entreprises d’ici fin 2019. Quel bilan peut-on tirer ? 

    De par les retours du comité d’évaluation des ordonnances, des employeurs et des salariés, le bilan est aujourd’hui mitigé. Les acteurs n’ont pas encore intégré les enjeux induits par ce nouveau cadre légal. Il en résulte des échanges peu constructifs car les négociations, souvent abordées dans une seule optique défensive, se font selon d’anciens schémas qui ne sont plus adaptés. Bien sûr, la baisse du nombre d’élus - environ 30 % -  est très sensible. Mais nous devons garder à l’esprit que les salariés n’ont que faire de ces « guéguerres » sur le nombre d’heures de délégation ou de mandats. 

    Comment relever ce nouveau défi syndical et permettre aux élus d’assurer leurs missions ? 

    Il s’agit de transformer la contrainte des ordonnances en opportunité pour construire un dialogue social gagnant-gagnant dans l’entreprise de demain. Pour cela, il faut désormais raisonner en objectifs plus qu’en moyens, en identifiant les vrais besoins spécifiques de l’entreprise, ceux des représentants des salariés et ceux des directions. C’est la clé de la réussite. Cette approche permet d’obtenir, à l’image de l’accord signé chez Norauto, des moyens qui vont au-delà du cadre légal qui, de l’aveu même de nombreux employeurs, est très bas ! Concernant les représentants de proximité, qui ne sont pas définis par la loi, il faut là encore partir des besoins de l’entreprise. Et leur permettre de faire remonter les problématiques terrain, en assurant une liaison efficace avec l’instance centralisée. 

    Le fait syndical n’est toujours pas suffisamment reconnu comme une mission de l’entreprise"

    Quels moyens ont mobilisé la CFE-CGC et ses fédérations pour aider les sections syndicales ?

    Toute négociation repose sur 3 piliers : le juridique, la technique et la stratégie. En début d’année, la Confédération a diffusé toutes les fiches thématiques pour appréhender les nouvelles règles. Nous venons par ailleurs de sortir un guide de la représentativité dans le cadre de la mise en place du CSE, qui traite toutes les étapes du développement : création de la section, négociation etc. Enfin, sur le volet stratégique, la CFE-CGC, avec ses fédérations, a mis en place un groupe collaboratif. Lequel va prochainement déboucher sur un outil recensant, via une base de données, les accords CSE et les bonnes pratiques pour négocier.

    Dans ce dialogue social en mutation, la problématique de la valorisation des parcours syndicaux devient centrale.  

    Le fait syndical n’est toujours pas suffisamment reconnu comme une mission de l’entreprise. La CFE-CGC va continuer de se battre en faveur de la reconnaissance de la mission syndicale et pour la valorisation des parcours. C’est un enjeu fondamental, surtout au regard de toutes les compétences requises pour un poste d’élu au CSE ! Si l’on veut des candidats qui s’engagent pour être acteurs du dialogue social en entreprise, ils doivent y trouver leur compte, en tenant compte notamment de la nouvelle limitation (à 12 ans) des mandats. Cela passe par la bonne intégration des parcours, des évolutions de carrière et des postes en lien avec les compétences acquises durant l’exercice des mandats.
     

    Propos recueillis par Mathieu Bahuet